EDITORIAUX 2009

Juillet-août 2009
Prospective de la joie de lire

« La joie de lire », c’était le nom de la librairie de François Maspero, disparue en 1974. Aujourd’hui, c’est la librairie américaine Brentano’s, installée depuis 1895 avenue de l’Opéra à Paris, qui vient d’être placée en liquidation judiciaire. Aux Etats-Unis, les municipalités frappées par la crise ferment les bibliothèques. Ray Bradbury, 89 ans le 22 août, auteur des Chroniques martiennes et de Fahrenheit 451 – température à laquelle le papier prend feu et qui raconte l’histoire d’une dictature brûlant les livres et de ceux qui les mémorisent pour qu’ils continuent d’exister – a engagé un combat pour sauver les bibliothèques.

Vive Internet et ses moteurs de recherche qui mettent toutes les bibliothèques du monde à la portée de chacun où qu’il soit ! C’était le rêve de la bibliothèque d’Alexandrie : réunir tous les livres, les rendre accessibles à tous ceux qui voulaient accéder à la connaissance.

Vive le livre, la lecture, l’ambiance des bibliothèques. Leur modernité est égale à celle des infinies ressources d’Internet. La complémentarité entre les unes et les autres est exemplaire. Le véritable risque serait celui du simplisme, le même qui pour des raisons budgétaires ferme les bibliothèques sous prétexte qu’Internet rend les mêmes services. Rappelons-nous l’autodafé, art pratiqué tout au long de l’Histoire et dans lequel l’Inquisition et le nazisme ont fait preuve d’un talent remarqué. Nous sommes exposés au risque d’autodafés soft, qui consisteraient non à brûler des livres sur un bûcher mais à les recycler…

Evitons de nous retrouver un jour, sans nous en être rendus compte à temps, dans la situation décrite par Umberto Ecco dans Le nom de la rose : quelques rares livres survivent, portent les prodigieuses connaissances des Anciens, quelques personnes consacrent leur vie à les conserver dans des sanctuaires cachés.

Armand Braun

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