Prospective.fr – Mai 2019 – Edito

Prospective : jeu de cartes

Hommage à tous ceux qui, au fil du temps, ont inventé des moyens de s’orienter sur la Planète et sont donc à l’origine de toutes nos civilisations !

À ces artistes, ancêtres des astronomes, qui, vers 16 500 avant notre ère, ont représenté sur les murs de la grotte de Lascaux les étoiles les plus brillantes du ciel nocturne.

Au premier des géographes, Ptolémée, qui, au IIe siècle, eut le projet d’une carte détaillée du monde connu à l’époque.

À ceux dont les portulans, cartes maritimes qui permettaient de repérer les ports, les îles, les courants, les récifs permirent aux marins de faire du cabotage et à ceux qui inventèrent l’astrolabe qui, indiquant la latitude à partir du ciel, les encouragèrent à s’aventurer plus loin. Avec les navigateurs, il y eut toujours des cartographes. Quand Christophe Colomb convia son frère Bartholomé à l’accompagner pour son second voyage en 1493, ce dernier était cartographe auprès d’Anne de Beaujeu, fille aînée du roi Louis XI.

À Waldseemüller qui, inspiré par Ptolémée, a publié en 1507 le premier planisphère. C’est sur ce document qu’il a d’abord été fait mention du nom « America », d’après les voyages (et peut-être avec la collaboration) d’Amerigo Vespucci. Ce planisphère en forme de cœur est une projection plane du globe terrestre. Il fait toujours la gloire de Saint-Dié-des-Vosges, où il a été imprimé et où un exemplaire est exposé dans la salle du Trésor de la Médiathèque.

À tous ceux qui, au cours des siècles, ont affiné leurs techniques pour arriver aux cartes que nous connaissons encore : globes terrestres, planisphères, cartes routières et maritimes, cartes d’état-major, et même Google Map…

Ces cartes nous les utilisons de moins en moins depuis l’avènement du GPS, sorte de retour à l’astrolabe puisqu’il part du ciel pour arriver à la terre.

Au GPS et à sa déclinaison participative Waze. Il nous permet de nous désencombrer et de nous passer de cartes matérielles surtout lorsque nous nous rendons dans un endroit où nous ne retournerons pas, de nous jouer des obstacles nouveaux et changeants qu’une carte papier ne peut anticiper tels que les modifications de sens interdits, les chantiers, les embouteillages… Grâce au GPS on ne risque plus de se perdre.

Et hommage, maintenant, à what3words. Cette application de géocodage permet de communiquer un emplacement précis sans passer par la latitude et la longitude, sans l’aide de satellites, et en évitant les confusions dues entre autres aux homonymies entre noms de rues ou noms de villes. Les inventeurs du système ont divisé la surface du globe en 57 000 carrés de trois mètres de côté et attribué à chacun une adresse en trois mots communs, en 36 langues. Gageons que bientôt chacun d’entre nous connaîtra les trois mots désignant précisément sa maison. La Statue de la Liberté, elle, est située à l’emplacement défiler.révélons.revisser.

Et c’est ainsi que, comme le raconte Karl De Meyer dans Les Échos week-end, « dans les steppes de Mongolie, on peut apercevoir parfois, au sommet d’une colline, un éleveur nomade, le bras levé, à la recherche d’un signal de réception. Il est en train de communiquer les coordonnées de son nouveau campement, au milieu de nulle part, aux membres sédentaires de sa famille ou à des amis de la ville. Ces derniers se chargeront ensuite d’actualiser les données sur la plate-forme Airbnb à l’attention des touristes en quête de vacances différentes. »

Depuis nos lointains ancêtres qui figuraient les étoiles sur les parois des grottes jusqu’à nous autres, prospectivistes, le fil de la créativité tournée vers les lointains ne s’est jamais rompu.

Hélène Braun

Vous pouvez voir le planisphère de Waldseemüller sur le site de la Bibliothèque du Congrès des Etats-Unis : https://www.loc.gov/resource/g3200.ct000725

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