PROMOUVOIR LA DÉMARCHE PROSPECTIVE

prospective>>> Le pouvoir est à la cyberpuissance
>>> Uber : un nouveau modèle pour le monde du travail ?
>>> Cher placebo
>>> L’incroyable voyage du cerf Hermione
>>> Les premières images de l’univers
>>> Une nouvelle méthode pour neutraliser le gaz carbonique
>>> Fidèle à son chien
>>> Les entreprises délaissent-elles la science ?
>>> Les grands textes en algorithmes
>>> Une équation pour la Saint-Valentin

Le pouvoir est à la cyberpuissance

Le Net engendre une forme nouvelle de pouvoir dont il est encore difficile de dire les contours et les conséquences, mais qui s’installe. Possède l’e-pouvoir celui qui nourrit et cultive les esprits, organise les connaissances, récolte et analyse le Big Data. Ecartons les craintes d’un formatage à la Orwell, personne ne songe à cela. Mais le Net est un ultrapuissant vecteur de cette e-civilisation. Le Web déstabilise, remplace les uns après les autres, de plus en plus de métiers : la musique, l’information, le commerce, la banque. Nous n’en sommes qu’au début. Les ambitions de Google dans la santé, l’espace, le tourisme, etc. et d’Apple dans l’automobile peuvent paraître démesurés. Ce serait une erreur : Google, Apple, Facebook, Amazon ont une bien meilleure connaissance des clients que les groupes pharmaceutiques ou les constructeurs automobiles. Ils peuvent, du jour au lendemain, récupérer la relation client, s’arroger le gros des marges et transformer les industriels en sous-traitants, comme ils l’ont fait dans l’informatique puis dans la téléphonie.

Eric le Boucher – Les Echos – 20 janvier 2015

 

Uber : un nouveau modèle pour le monde du travail ?

Les chauffeurs Uber travaillent-ils moins et gagnent-ils plus d’argent que les chauffeurs de taxi traditionnels ? Peut-être. Peut-être pas.

En tout cas, cette façon de travailler est en passe de s’étendre à toutes sortes de professions et nous allons sans doute vers une véritable « ubérisation » du monde du travail. Ni salariat à plein temps, ni auto-entreprenariat, il s’agit d’un troisième modèle. Dans ce modèle, les nouvelles technologies rendront le travail plus flexible, permettant à chacun d’organiser à sa guise son job, ou plutôt ses jobs. Transformation souhaitable ou redoutable ?

Arun Sundararajan, professeur à la Business School de l’Université de New-York, considère cette perspective avec optimisme : « Dans l’avenir, les gens auront un portefeuille de rôles leur permettant de générer des revenus. Ils seront tour à tour chauffeur Uber, acheteur et livreur de produits d’épicerie Instacart, hôte Airbnb, et Taskrabbit. » (Un Taskrabbit effectue contre rétribution toutes ces petits tâches qui en ennuient beaucoup : les courses, le montage d’un meuble en kit, la promenade du chien … )

Le revenu des gens qui effectueront ainsi une multiplication de petits boulots sera plus fluctuant, moins prévisible, et leur emploi ne sera plus sûr du tout. La carrière deviendra un concept obsolète.

Le plus préoccupant, à propos de ces jobs à la demande, ce n’est pas le revenu, mais la question du pouvoir et de la régulation : un avenir où ce seront des robots, non des hommes, qui détermineront ce que vous ferez, combien de temps et pour quelle rémunération, c’est un peu effrayant.

Imaginez un monde où chacun effectue une fraction de travail à n’importe quelle heure et où personne ne sait quelle sera la prochaine tâche qu’on lui assignera. Quels effets sur la vie personnelle, les relations entre les personnes, la famille ?

L’économie à la demande peut sembler une meilleure alternative que l’automatisation de tout le travail, mais il n’y a peut-être pas de quoi pavoiser.

Farhad Manjoo – International New York Times – 29 janvier 2015

Cher placebo

Des chercheurs ont dit à douze patients souffrant de la maladie de Parkinson qu’ils participeraient à un essai thérapeutique de deux médicaments différents, administrés sous forme d’injection. Le premier coûtait 100 $ la dose, le deuxième 1 500 $. On a expliqué aux patients que ces médicaments contenaient le même principe actif et dans les mêmes quantités, mais que le procédé de fabrication était différent et qu’on voulait s’assurer que les deux avaient la même efficacité. Ce que les malades ignoraient, c’est qu’ils recevaient exactement la même dose de sérum physiologique.

Le placebo cher a deux fois mieux fonctionné que le placebo bon marché. Cela s’est traduit non seulement dans les tests de motricité, mais dans l’imagerie cérébrale !

La principale anomalie chimique de la maladie de Parkinson est le déficit en dopamine dans le cerveau. Le médicament à ce jour le plus efficace est la Lévodopa, qui augmente cette dopamine dans le cerveau. Et ce qui est remarquable, c’est que le placebo le plus cher a eu, dans cette expérience, exactement le même effet que la Lévodopa …

Nicholas Bakalar – International New York Times – 4 février 2015


L’incroyable voyage du Cerf Hermione

Le Cerf Hermione – encore appelé Cerf à queue noire ou Cerf Mulet pour ses caractéristiques anatomiques – est un cerf américain qui vit tout l’hiver dans le Désert Rouge, sur le versant Est des Montagnes Rocheuses. Au printemps, un bon nombre disparait. Sans doute, comme tant d’autres espèces, ces cerfs migrent-ils pour de plus verts pâturages afin de reconstituer les réserves graisseuses qui leur permettront de franchir un nouvel hiver. Mais où vont-ils ?

Pour le savoir, des chercheurs ont commencé en 2011 de véritables rodéos, avec un hélicoptère en guise de cheval et un grand filet à la place du lasso. Arrachage d’un poil de moustache pour l’ADN, prise de sang et prélèvement de selles pour le métabolisme et le régime alimentaire, IRM pour l’index de masse graisseuse, pose d’un collier équipé d’un GPS et, hop, les animaux sont relâchés jusqu’à la prochaine fois.

Et l’on sait maintenant que les Cerfs Hermione passent l’été dans la vallée de la rivière Jackson, à 250 km de leurs quartiers d’hiver. Ils mettent deux mois pour y arriver, faisant halte en route, là où éclot la végétation afin de reconstituer leurs réserves graisseuse.

Le plus remarquable, c’est que, malgré les emprises de l’homme sur le territoire, le chemin semble toujours le même. Il y a notamment sur le chemin un goulot d’étranglement dont les terrains étaient à vendre. Comment faire pour que des constructions ne barrent pas la route ? Comme il ne s’agit pas de vastes territoires mais de quelques zones bien définies, une fondation a pu se faire aider pour acquérir ces terrains. Ainsi, la migration d’espèces sauvages entre-t-elle peu à peu dans la conception de la gestion des territoires.
Beaucoup de monde a contribué à cette action : les scientifiques ont donné les informations, les militants écologistes s’y sont intéressés, de même que des associations de chasseurs. Grâce à leurs actions conjuguées, le Cerf Hermione peut continuer sa migration ancestrale. Et bientôt, ce type de coopération pourrait faire école et favoriser d’autres espèces sauvages, en Amérique ou ailleurs dans le monde.

James Gorman – International New York Times – 4 février 2015


Les premières images de l’univers

Les scientifiques ont entrepris de déchiffrer l’histoire de l’univers en étudiant les planètes, les astéroïdes, les comètes et autres objets de notre système solaire et en recueillant la lumière émise par les étoiles distantes et les galaxies. Une source d’information majeure pour reconstituer cette histoire est le rayonnement fossile provenant d’une époque où l’univers était particulièrement chaud et dense, 380.000 ans après le Big Bang. Grâce à l’expansion de l’univers, ce rayonnement est observable aujourd’hui sous forme d’ondes.

De 2009 à 2013, Planck, le satellite de l’Agence européenne de l’Espace (ESA) a scruté ce rayonnement fossile plus en détail que jamais. D’infimes différences dans les températures et les densités révèlent les germes des galaxies d’aujourd’hui. Les résultats de cette mission, publiés régulièrement depuis deux ans, affinent l’image des premiers temps de l’univers.

Ceux qui viennent d’être rendus publics permettent de déterminer de façon précise le contenu matériel de l’univers. Il est constitué pour 4,9% de matière ordinaire (celle dont est fait tout ce que nous voyons), 25,9% de matière noire dont la nature nous est inconnue, et 69,2% d’énergie noire (tout ce qu’on sait d’elle, c’est qu’elle est responsable de l’accélération de l’expansion de l’univers). Les observations de Planck permettent encore de préciser l’âge de l’univers, qui s’établit à 13,77 milliards d’années, et de dater la naissance des toutes premières étoiles, qui se sont « allumées » 550 millions d’années après le Big Bang, c’est à dire plus tard qu’on ne le supposait.

Et bien d’autres choses encore que les astrophysiciens et cosmologistes vont pouvoir étudier : la découverte vient juste de commencer !

Voir les images sur : sc.esa.int/planck – 5 février 2015
Yann Verdo – Les Echos – 9 février 2015


Une nouvelle méthode pour neutraliser le gaz carbonique

Comment se débarrasser du dioxyde de carbone avant qu’il ne fasse des ravages sur le climat ? Des experts pensent qu’il faut le capturer et le stocker sous terre. Par exemple, le projet Boundary Dam au Saskatchewan (Canada) a commencé à le faire pour les émissions dues à l’une de ses centrales au charbon. La méthode : le dioxyde de carbone est comprimé au point de se liquéfier, injecté dans une couche de sable, puis enterré sous un ancien gisement de pétrole. Mais les bulles, toujours actives, du gaz carbonique risquent de ressurgir à la surface.

Une nouvelle méthode consisterait à transformer le gaz carbonique avant de l’enterrer ; Il s’agit d’injecter ensemble du gaz carbonique et de l’eau dans de la roche volcanique. Une réaction chimique permet alors au CO² de se minéraliser pour devenir du carbonate de calcium, bien moins volatile et plus facile à stocker.

Cette technique est actuellement testée en Islande, terre de volcans, littéralement couverte de basalte issu d’anciennes coulées de lave. Il semble que cela fonctionne. D’ailleurs, on s’en est rendu compte dès le début : à deux reprises, une pompe, installée au fond d’un puits voisin pour enregistrer le processus, est tombée en panne ; or, les deux fois, quand on l’a sortie de l’eau pour la réparer, on l’a trouvée couverte de carbonate de calcium.

Si la technique doit être appliquée à grande échelle, il faudra surmonter deux obstacles coûteux : amener le gaz carbonique là où il y a du basalte, en Islande et ailleurs dans le monde ; y ajouter de l’eau. Gaspiller de l’eau, si précieuse, pour se débarrasser d’un polluant est absurde. En revanche, on pourrait utiliser à cette fin les eaux usées des centrales nucléaires.

Henry Fountain – International New York Times – 11 février 2015


Fidèle à son chien

Yahui et Tatsuo Matsui se sont rencontrés grâce à leurs chiots, Ai et Doggy. A leur dîner de mariage, en 2004, ils les ont donc habillés en mariés et assis à la place d’honneur. Aujourd’hui les chiens ont 15 et 13 ans. Ai marche lentement et Doggy peut à peine remuer la tête.

Le problème c’est que les Matsui ne peuvent les emmener chez le vétérinaire, car ce ne sont pas des chiens vivants mais …. des robots. Entre 1999 et 2006, Sony a produit environ 150 000 chiens-robots, appelés Aibos (prix de vente : 600 à 2 000 $). Puis la fabrication a été arrêtée ; plus de pièces de rechange ; plus de service après-vente. Comment faire ?

M et Mme Matsui sont membres d’une association qui réunit régulièrement les propriétaires de ces chiens-robots, appelés Aibos. Là, les chiens-robots se rencontrent sur le tatami, remuent la queue, courent après des balles de caoutchouc tandis que leurs maîtres mangent des gâteau, boivent du thé et s’entraident pour réparer leurs compagnons. Une révision annuelle au moins est indispensable. Le point le plus faible : une articulation à la patte.

Un ancien technicien de Sony, M. Norimatsu, a ouvert un magasin de réparations de gadgets électroniques obsolètes en tout genre près de Tokyo. Depuis 2011, il a traité une cinquantaine d’Aibos (coût : 210 à 500 $). Et il en a une centaine en liste d’attente.

L’attachement d’un Japonais à son Aibo est une expression de la culture japonaise d’aujourd’hui : un robot est un ami, un membre de la famille.

Certains ont émis le souhait de se faire incinérer avec leur compagnon. Quand ce n’est pas le cas, M. Norimatsu peut récupérer les pièces détachées des Aibos restés sans maître. Mais il ne s’agit pas de simples objets mécaniques. Auparavant, il prend soin d’amener les « orphelins » dans un temple pour une cérémonie religieuse destinée à réunir l’âme de chaque chien à celle de son maître.

Takashi Mochizuki et Eric Pfanner – The Wall Street Journal – 12 février 2015

 


Les entreprises délaissent-elles la science ?

Si l’importance de la recherche scientifique pour la croissance économique est largement reconnue, les rôles respectifs de la recherche privée et de celle faite par des institutions à financement public sont beaucoup plus controversés. Depuis la fin du XIXe siècle, en Allemagne d’abord, les grandes entreprises ont beaucoup investi dans la recherche, une pratique qui s’est largement répandue ensuite, surtout aux Etats-Unis. En sera-t-il autrement au XXIe siècle ?

D’une étude intitulée Tuer la poule aux œufs d’or : le déclin de la science dans la R&D des entreprises, il ressort que le nombre des publications scientifiques de chercheurs travaillant dans de grandes entreprises des Etats-Unis et d’Europe a nettement diminué entre 1980 et 2007.

Pourtant, les dépenses de R&D, en part du chiffre d’affaire de ces entreprises, ont presque doublé pendant la même période ; et le pourcentage des entreprises ayant obtenu un brevet est passé de 20% du total à presque 30% pendant ce quart de siècle. Il ne s’agit donc pas d’une baisse globale des investissements mais plutôt d’une diminution de l’importance de la science fondamentale dans ces investissements. « Les entreprises semblent valoriser les œufs d’or (les brevets) autant qu’avant, mais elles ont arrêté de valoriser la poule (la compétence scientifique). »

On pourrait penser que cette évolution reflète une réticence des entreprises à publier plutôt qu’une diminution de leur attachement à la science fondamentale. Il semblerait que non, car la diminution des publications est plus importante dans les revues de recherche fondamentale que dans celles de recherche appliquée, où la confidentialité est plus importante.

Les auteurs pensent que les entreprises, soumises à une concurrence grandissantes sur leurs principaux marchés, se focalisent désormais sur leur cœur de métier. Par exemple, la baisse des publications est plus notable de la part des entreprises qui augmentent leurs importations depuis la Chine.

La recherche appliquée a besoin de la recherche fondamentale. Les budgets publics pour la recherche fondamentale sont sous pression. Si les entreprises privées investissent moins à leur tour, nous en verrons probablement les conséquences dans les décennies à venir. Car c’est la recherche fondamentale qui est source d’idées nouvelles et inattendues.

Ashish Arora, Sharon Belezon et Andrea Patconni – Killing the Golden Goose: The Decline of Science in corporate R&D – NBER ( The National Bureau of Economic Research) Working paper n°20902 – janvier 2015
Paul Seabright, directeur de l’institut d’études avancées de Toulouse – Le Monde – 13 février 2015


Les grands textes en algorithmes

Dans les universités de lettres, la digitalisation des textes et leur mise en ligne se poursuit depuis une dizaine d’années. Ainsi est apparu un nouveau genre d’universitaires, aux compétences à la fois littéraires et scientifiques, capables d’étudier les emplois du mot lascivium chez Cicéron et de réécrire les textes en code informatique python afin que n’importe quel lecteur puisse retrouver tous les textes de Cicéron où apparaît ce mot. Les écrits passent ainsi du stade de chenille à celui de papillon et la littérature prend des allures scientifiques.

Les nombres, en effet, permettent de décrire des modèles et des relations avec une précision que les mots n’ont pas. Ajouter aux textes des données numériques et statistiques, c’est permettre de les étudier de la même façon que les biologistes analysent des génomes et que les cosmologistes classent des galaxies.

Du côté des tenants d’un lecture purement esthétique, dès 1973, le professeur de littérature américain Harold Bloom s’inquiétait : « Quand l’étude des poésies se réduira à la recherche des sources et au comptage des expressions, sa maîtrise passera des érudits aux ordinateurs et ce sera l’apocalypse ! » Cette « apocalypse » s’est produite en 2012, quand un groupe de mathématiciens a analysé les modèles des influences stylistiques dans 7.700 textes. Un an après que ce même Bloom ait écrit : « Je suis un critique littéraire épicurien, je me fie aux sensations, aux perceptions, aux impressions ».

Mais pour les scientifiques les impressions sont trompeuses, elles nous disent ce que nous voulons entendre, non ce qui est.

Un érudit traditionnel, émettra une hypothèse sur l’origine, l’utilisation ou la signification d’un mot, d’une image, d’une expression ou d’un thème chez un auteur. Il trouvera des citations à l’appui de sa thèse. Un étudiant versé en informatique pourra numériser ce texte là et aussi des milliers d’autres, en tirer des algorithmes, des graphiques et démontrer la réalité ou la fausseté de cette intuition.

Avec des limites. Car il n’est nul besoin d’algorithmes pour percevoir les paraboles des tragédies de Sophocle, l’ironie des romans de Jane Austen, les beautés des tableaux de Rothko …

D’un autre côté, les données chiffrées commencent à se révéler très efficaces pour révéler davantage de sens. On peut donc s’attendre à une bataille entre les tenants de la culture classique et ceux de la culture augmentée par les algorithmes. Mais les premiers finiront bien par utiliser les nouveaux outils qui permettent de parcourir un maximum de textes ou d’en faire apparaître les plus infimes détails.

« Les littéraires « analogiques » vont-ils accepter la culture « numérique » ? J’espère que oui. Après tout elle contribuera à l’explicitation des produits du génie humain qu’ils connaissent et aiment. Et elle porte en elle la promesse d’une république de la connaissance unifiée ».


Armand Marie Leroi, professeur de biologie à l’Imperial College de Londres, auteur notamment  » The Lagoon : How Aristotle Invented Science » – International New York Times – 14 février 2015


Une équation pour la Saint-Valentin

L’Equation Drake, inventée en 1961, par l’astrophysicien Frank Drake, est un calcul de probabilités destiné à estimer le nombre de planètes de notre galaxie susceptibles d’abriter des formes de vie intelligente.

En substituant « petites amies » à « extra-terrestres intelligents», des jeunes gens essaient de résoudre un autre mystère de l’univers : quelles sont mes chances de rencontrer l’âme-sœur dans la ville où j’habite ?

L’Equation Drague se présente comme suit :

Rencontre romantique = Np (nombre total de la population) x Fg (fraction de la population ayant le bon genre en pourcentage de la population totale) x Fn (% de célibataires) x Fc (% de celles qui ont un certain niveau d’éducation) x Fy (% de celles qui sont dans la bonne tranche d’âge) x Fa (% de celles que je vais trouver attirantes) x Fa2 (% de celles qui vont me trouver attirant).

La beauté de la chose, c’est qu’on peut y faire entrer n’importe quel critère (diplômée d’université, blonde, brune, de gauche, de droite, amatrice de mots croisés, fan de science-fiction, etc.)

Il y a quelques années, un Américain de 31 ans, fraîchement débarqué à Londres, a calculé que ses chances d’y rencontrer une petite amie convenable n’étaient que de 26. Son équation à lui se présentait ainsi : nombre total de Britanniques (60 975 000) x pourcentage de ceux qui habitent Londres (13%) x pourcentage de femmes (51%) x pourcentage de célibataires (50%) x pourcentage de celles qui ont entre 24 et 34 ans (20%) x pourcentage de celles ayant fait des études supérieures (26%) x pourcentage de celles qui pourraient lui plaire (5%) x pourcentage de celles à qui il pourrait plaire (5%) x pourcentage de compatibilité (10%). Sauf les trois dernières, déduites de son expérience personnelle, il avait trouvé toutes les données au Bureau national des statistiques.

Il n’est pas le seul. Toute une classe de Harvard s’est livrée au même jeu, un jeune homme a publié son expérience sous forme d’un essai intitulé, en hommage à Frank Drake : « Petit Homme Vert cherche partenaire ». Un informaticien de Saskatchewan ayant fait le même calcul était arrivé à la conclusion désespérée qu’il n’aurait jamais de petite amie… Pas besoin d’être un grand mathématicien pour deviner qu’on a davantage de chances de rencontrer l’amour à Philadelphie qu’à Saskatchewan.

Pourquoi tous ces jeunes gens peinaient-ils à trouver une compagne ? Parce qu’au lieu de draguer les filles, ils se réfugiaient dans des théories mathématiques expliquant que ce n’était pas de leur faute. Heureusement, depuis, ayant sans doute décidé que l’amour n’était pas seulement une histoire de calculs, ils sont tous en couple.

Jo Craven McGinty – The Wall Street Journal – 17 février 2015

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