Au revoir !

Ce numéro d’avril 2024 est la 250ème édition et la dernière de notre site www.prospective.fr

Cela fait vingt-trois ans que le site paraît régulièrement et le moment est venu pour nous de nous arrêter. 

Nous nous rendons compte, comme depuis le premier jour, que la conception et l’expérimentation de la démarche prospective restent des taches inachevées. Nous avons apporté notre contribution, mais nous sommes conscients de ses limites. 

Nous vous remercions, chers lecteurs, de votre fidélité. Nous remercions Mehdi Boutazir, notre webmestre qui nous accompagne si bien et depuis si longtemps.

D’autres, espérons-nous, prendront la relève et sauront, comme nous, travailler à l’écart des approches courantes. L’enjeu, demain plus qu’hier et aujourd’hui, consiste à déchiffrer le monde tel qu’il devient, pour autant qu’il recèle encore suffisamment d’énergie pour échapper à la menace sauvage qui plane autour de nous tous. 

Hélène et Armand Braun

 

Éditorial : Les migrants des compétences

L’Italie est victime de la « fuga del cervelli », en français « la fuite des cerveaux ». Entre 2012 et 2022 plus de 600.000 personnes ont émigré, pour la plupart des jeunes qualifiés. Le processus se poursuit. Les Pouvoirs publics déplorent que s’en aillent ceux dont l’économie et la société ont le plus besoin. Le potentiel créatif de la nation risque de s’assécher. 

Ce phénomène n’est pas propre à l’Italie. La France est frappée elle aussi mais, jusqu’à nouvel ordre, à un moindre degré. On l’observe à travers tout le continent, plus particulièrement en Europe Centrale. Il s’inscrit dans un contexte plus large, avec d’un côté l’intensification des migrations d’Africains vers l’Europe et de l’autre la baisse démographique que notre continent subit dans son ensemble. On l’observe plus intensément encore hors d’Europe, dans les pays qui ont la chance d’avoir formé des jeunes nombreux, qu’ils se désolent de voir partir.

Les explications sont diverses : les zones qui se développent sont, plus encore que dans le passé, des attracteurs, elles sont le lieu des connaissances, des revenus, de l’économie, de l’éducation, de la santé, de la justice, de la transformation du monde. Et elles sont le révélateur des ordres de grandeur. Ainsi, 1,5 millions d’ingénieurs sont formés en Inde chaque année, 1,3 millions en Chine, 450 000 en Russie, 250 000 aux États-Unis, 37 000 en France. 

De nouveaux flux humains s’installent. Ces migrants entraînent avec eux ou créent une fois installés une famille et des entourages. Ils façonnent à ce titre une géographie humaine des pleins et des vides : les pleins des zones qui continuent de se développer, le vide des zones urbaines ou rurales qui deviennent des déserts d’activités. 

Ce que l’on retrouve en arrière-plan, c’est l’aspiration à la liberté. Pourquoi Léonard n’est-il pas resté à Vinci, pourquoi tout au long du Moyen Age les étudiants se déplaçaient-ils d’université en université ? La différence est quantitative : ceux qui ont la chance de profiter de la situation sont beaucoup plus nombreux que par le passé, le monde entier leur est potentiellement ouvert. De tout temps, ceux qui le peuvent sont déterminés à rester les maîtres de leur destinée. 

Armand Braun 

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