Le 26 juin 2021, le chanteur Michel Polnareff adressait sur Twitter ce mystérieux message à ses fans : « Mon pubis me manque. » Certes, il avait auparavant exhibé ses fesses sur les affiches annonçant son concert à l’Olympia. Mais là il s’agissait évidemment d’un mauvais tour de son correcteur automatique : il avait voulu écrire « public ».
L’auteur de l’article résumé ici avait proposé par SMS à sa chef de service un projet d’article sur une émission de télé mettant en scène « une bande de brocolis ». « Brocolis ? » s’est-elle étonnée. Rectification : « Euh, je voulais dire bricolos ! »
A cause de ces algorithmes qui complètent ou corrigent nos messages on se tient bien souvent à une lettre de l’abîme. Petit florilège de ces embarrassants à peu près :
– N’oubliez pas d’apporter vos maillots de nain à la plage (bain, évidemment)
– Alors, finalement, cocu ? (pour covid)
– Rendez-vous au métro Braguette Sabine (Bréguet-Sabin)
– Je suis d’accord pour la bite à partager (l’habitat partagé)
– Au menu de ce soir, des spaghettis aux pesticides (pistou)
– Je vais suivre un stage de gynécologie à l’hôpital Cochon (Cochin)
– Votre idée est génitale (géniale)
– Sincères fellations pour votre mariage (félicitations)
– N’oublie pas les rouleaux de Somaliens (Sopalin)…
Nous sommes tellement pressés et faisons tellement confiance à la machine que bien souvent nous ne relisons le message qu’une fois qu’il a été envoyé. Et alors nous soupçonnons le dispositif d’intentions malveillantes.
Tous les correcteurs ne sont pas aussi mal élevés. Certains sont trop corrects, refusent les gros mots, remplaçant par exemple « salope » par « salopette ». Sous d’autres, se dissimule un poète oulipien. Ayant reçu le soir un texto uniquement composé de points d’interrogation et ne se souvenant plus de ce qu’il avait voulu écrire le matin, un professeur d’université relit ses SMS et constate que le correcteur automatique avait écrit « oasis délibéra ».
Pétain de correcteur automatique !
Nicolas Santorola – Le Monde – 11 septembre 2022