Il est tout à fait plausible que, parmi les milliards et milliards d’exoplanètes, un grand nombre soient compatible avec la vie, c’est-à-dire situées assez près d’une étoile pour bénéficier de son énergie et assez loin pour que les molécules ou les structures construites ne soient pas ensuite détruites par un excès d’énergie. Comment seraient les habitants de ces planètes ?
Admettons que les lois de la physique et de la chimie sont les mêmes dans l’univers entier que dans notre petite portion d’univers, l’architecture de la complexité des êtres resterait partout la même : des reproductions en mosaïque, la reproduction sexuée qui permet la différenciation, l’arborescence (ici chez les plantes et les coraux), la symétrie bilatérale qui assure la mobilité, le cocon qui enveloppe une graine, un œuf, une chrysalide. Il faut aussi tenir compte de l’acquisition d’une température interne constante quelles que soient les variations du milieu, des organes récepteurs et moteurs…
L’une des spécificités des êtres vivants qui peuplent la Terre, c’est la diversité vertigineuse de leurs morphologies, liée à l’extrême variété des milieux auxquels ils ont pu s’adapter.
La principale erreur de beaucoup d’auteurs de science-fiction, c’est de concevoir les extra-terrestres à notre image. Le spectacle même des innombrables adaptations des êtres vivants d’aujourd’hui et de jadis sur Terre devrait nous pousser à rêver des êtres anatomiques complexes, avec la même vertigineuse diversité du vivant, pas seulement celle du bipède primate. Par exemple, on sait que l’évolution sur Terre aurait pu favoriser les pieuvres, qui ont un cerveau géant, plutôt que les bipèdes que nous sommes. Imaginer des extra-terrestres c’est conjuguer les exigences scientifiques et l’imagination débridée.
Des artistes pourraient figurer, dans le cadre des contraintes des chaînes carbonées très différentes, des acides nucléiques et des protéines terrestres, avec des codes génétiques inconnus, des êtres vivants lourds, mais portés par des milieux aquatiques, ou des océans de méthane, des sexualités nouvelles et débridées entre des sexes parfois nombreux. Nos explorateurs des possibles, nos navigateurs des formes, nos cosmonautes de l’imaginaire se promèneront dans des forêts d’arborescences, géantes ou minuscules, parmi lesquelles circuleront, solitaires ou en bancs, des êtres aérodynamiques, bilatéraux, aux formes les plus étranges.
Georges Chapouthier – ISTE OpenScience, e-Revues en libre accès – n° 664 – 9 février 2022