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Nous devons opérer une révolution complète de nos pratiques agricoles et de notre rapport à la terre. L’agriculture commence par la terre. Il faut un millénaire à la nature pour fabriquer un sol fertile, un humus vivant, un terroir unique. Il nous a fallu à peine quelques décennies pour détruire plus de la moitié des sols européens, à coup de chimie et de labour profond. Nous avions cru avoir trouvé la martingale : des graines brevetées, des adventices (engrais et des produits phytosanitaires) standardisés, des rendements toujours croissants. Résultat : nous sommes devenus dépendants à la manne très temporaire des énergies fossiles. Et nous avons tué la vie, celle des oiseaux, des insectes, des vers de terre.
Ce n’est pas irrémédiable, à condition de reconnaître nos erreurs. Il ne s’agit pas de revenir en arrière mais de poursuivre la marche du progrès. Nous pouvons tirer parti de la nature tout en la rendant plus belle, plus diverse, plus luxuriante. Ce progrès scientifique et social, c’est l’agroécologie. Ce n’est pas une technique contraignante mais une philosophie : prendre soin de la terre. L’agroécologie fait l’objet d’innombrables expérimentations et se décline sous différentes formules : permaculture, agroforesterie, agriculture de conservation ou régénérative, etc.
Il s’agit de trouver dans la nature elle-même les solutions aux problèmes qu’elle nous pose : accueillir des prédateurs naturels pour éliminer les ravageurs, réduire les adventices par des associations culturales, alléger et simplifier les techniques de labour. Le rendement en pâtit très peu et l’apport de matière organique permet en outre de stocker le carbone (une augmentation de 4 pour 1000 de celles-ci permettrait d’absorber toutes les émissions excédentaires de l’humanité).
Comme l’expliquait déjà Élisée Reclus à la fin du XIXe siècle, « le mal que l’homme a fait, il peut le défaire ».
Gaspard Koenig – Les Echos – 3 février 2024