Notre rythme effréné nous empêche trop souvent de faire une pause, un arrêt sur image, simplement pour contempler le monde autour de nous. Admirer un ciel, un sourire, une lumière particulière ou encore une œuvre d’art nécessite en effet de passer du mode « apprentissage » au mode « esthétique ».

Le mode « apprentissage » est marqué par un souci d’efficacité et une optimisation de nos capacités intellectuelles. Mais quand nous passons au mode « esthétique », notre attention ne se focalise que sur un seul objet, que nous admirons simplement pour sa beauté et l’émotion qu’il fait naître en nous, sans aucune arrière-pensée concernant un objectif d’efficacité.

Pourtant, s’arrêter pour admirer les merveilles autour de nous pourrait être un sérieux moteur à l’apprentissage. Pietro Sarasso et ses collègues de l’université de Turin n’hésitent pas à faire l’hypothèse que si le plaisir de la contemplation s’est développé au cours de l’évolution, c’est peut-être justement parce qu’il nous permet d’arrêter nos actions pour nous concentrer sur la perception, éprouver du plaisir et, au bout du compte, mieux mémoriser ce que nous avons devant les yeux.

On peut le penser intuitivement et des expériences mettant notamment en évidence l’activité cérébrale le démontrent : on apprend plus facilement ce qui nous plaît.

Nous devrions donc nous rendre suffisamment disponibles, user et abuser de moments de contemplation pour doper notre mémoire et notre attention. Autrement dit, réduire notre charge mentale et nous obliger chaque jour à quelques minutes de contemplation ! Qui sait cela pourrait même se révéler très bénéfique pour nos capacités cognitives…

Sylvie Chokron, directrice de recherches au CNRS, Laboratoire de psychologie de la perception –
Le Monde – 13 décembre 2023

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