C’est bien connu, les villes trop éclairées désorientent les animaux, notamment les oiseaux. Mais les humains aussi en souffrent sans le savoir. Des chercheurs du National Institute of Environnemental Health Sciences en Caroline du Nord (Etats-Unis) ont montré que dormir près d’une source de lumière aussi infime qu’un bouton de veille peut faire prendre un kilo par an, et plus l’exposition à une lumière artificielle est forte et régulière, plus elle dérègle l’horloge biologique calée sur le cycle naturel des jours et des nuits pour tous les êtres vivants. C’est grâce à l’obscurité et au sommeil de bonne qualité qu’elle procure que nous reprenons des forces, consolidons notre mémoire, nettoyons notre cerveau, régulons notre production d’hormones et notre système cardiovasculaire. Par exemple, deux études israéliennes suggèrent une association significative entre le niveau de pollution lumineuse dans certaines régions et la fréquence de cancers hormonaux comme ceux de la prostate et du sein. Or l’éclairage artificiel a augmenté de 94% depuis 1990 et s’accroît encore de 2% par an, tant en quantité qu’en intensité. Les points lumineux sur la voirie ont augmenté de 89% et leur durée est passée de 2 100 à 3 500 heures. Près de 83% de la population mondiale vit sous un ciel artificiellement lumineux et un tiers ne voit plus la Voie Lactée.

Voilà un joli paradoxe : il est essentiel de préserver l’obscurité de la nuit pour notre santé ; il est essentiel de maintenir l’éclairage des rues dans les villes pour des raisons de sécurité (et nous savons maintenant que les LED ne sont pas la solution).

Paul Molga – Les Echos – 21 novembre 2022

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