Marika Sterne pour Prospective.fr

 

La truffe, qui pousse sous le sol, au pied d’arbres comme le chêne ou le noisetier, n’est pas, contrairement aux autres champignons, capable de libérer ses spores dans l’environnement pour se reproduire. Elle doit passer par l’estomac et les fèces d’animaux qui les repèrent à leur parfum, les déterrent et les mangent. Ce sont surtout les sangliers et les rongeurs qui jouent ce rôle. 

Des chercheurs français et italiens ont étudié le rôle des limaces dans ce processus. En comparant, notamment à l’aide d’un microscope à force atomique, les spores passées par le tube digestif de la limace et celle de la souris, ils se sont rendu compte que la paroi de celles ingérées par des limaces était bien plus modifiée. En effet, les souris mâchouillent et ne broient pas très finement ; les limaces ont une espèce de râpe buccale, la radula, qui réduit tout en poudre. Les enzymes digestives de la limace ont mieux accès à l’extérieur de la spore, ce qui facilite la germination.

C’est ainsi qu’on a pu interpréter un phénomène jusqu’alors inexpliqué : les truffes physiquement proches les unes des autres sont aussi proches génétiquement, alors qu’à tout juste un mètre elles peuvent être différentes : la dispersion la plus efficace est orchestrée par la limace ou d’autres petits invertébrés qui parcourent de très petites distances.

La limace qui grignote le champignon jusqu’à le rendre impropre à la consommation était, jusqu’à présent, l’ennemi des trufficulteurs. Pour qu’elle devienne son ami, il faudra trouver le bon équilibre. 

Anne-Laure Frémont – Le Figaro – 12 juin 2021

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