La mémoire à long terme persiste (les souvenirs d’enfance) quand la mémoire à court terme (que suis-je venu faire dans cette pièce ?) fait défaut. La capacité de restaurer rapidement les informations stockées dans la mémoire à court terme diminue à partir de l’âge de trente ans. Mais l’âge n’est pas le facteur principal. Ce qui diffère, c’est la manière dont on l’envisage. Quand cela nous arrive à 20 ans, on sait que c’est une étourderie et on se dit : « je n’ai pas assez dormi » ou bien « j’ai trop de trucs auxquels penser en ce moment ».  Quand cela nous arrive à 60 ans, on s’inquiète : « ça y est, j’ai un Alzheimer ». Or les défauts de la mémoire à court terme n’indiquent pas obligatoirement un désordre biologique. En l’absence de maladie avérée (Alzheimer ou démence), on observe très peu ou pas du tout de déclin de la capacité de mémorisation et d’apprentissage chez les adultes, même au-delà de 85 ans.

Certains aspects de la mémoire s’améliorent même avec le temps. Ainsi de la faculté de repérer dans les faits des motifs, des modèles, des récurrences et d’en déduire des prédictions exactes augmente avec l’expérience, donc avec l’âge. C’est pourquoi il faut montrer des dizaines de milliers d’images de feux rouges ou de chats à un logiciel avant qu’il ne soit capable de les reconnaître. C’est pourquoi un médecin âgé lira plus vite une radio que son jeune confrère.

D’où vient alors la lenteur à se remémorer des plus vieux ? C’est qu’ils doivent extraire l’information d’une base de données beaucoup plus importante.

« Quand j’avais dix ans, le premier caramel auquel j’ai goûté avait un goût incomparable. Et la première odeur d’herbe fraîche dans un pré. À soixante-deux ans, je peux encore les apprécier, mais la sensation s’est émoussée avec la répétition. Alors, j’essaie de trouver d’autres nouveautés dans mes expériences sensorielles : des jardins et des forêts où je ne suis jamais allé, les nouveaux chocolats artisanaux que fabrique mon confiseur… »

Se confronter à la nouveauté est la meilleure façon de conserver un esprit jeune et malléable, de le faire évoluer jusqu’à l’âge de 80, 90 ans et au-delà.

Daniel J. Levitin, neuroscientifique – International New York Times – 25 janvier 2020
Pour écouter Daniel J. Levitin interpréter sa chanson: « Just a memory”

 

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