Arnaud Pourredon, 26 ans, porte parfois la tenue occidentale du start-upeur, mais au quotidien il est vêtu du boubou de sa deuxième patrie, l’Afrique. 

Sa vocation débute en 2015, quand, étudiant en médecine à Bordeaux, il participe à une opération humanitaire après les terrible séismes au Népal. Il découvre sur place une autre catastrophe : celle des faux médicaments, que les pharmaciens vendent sans en avoir conscience L’année suivante, même constat en Tanzanie, où il effectue un stage hospitalier. En 2017, en Bolivie, il observe des circuits de faux médicaments en ligne. Selon l’OMS, tous ces faux médicaments provoquent chaque année 1 million de décès et d’innombrables maladies.

Arnaud imagine alors une riposte entrepreneuriale : créer une application à destination des pharmaciens afin que ceux-ci puissent identifier les faux médicaments. Pour cela, il arrête ses études de médecine et lance « Meditect » avec son ami Romain Renard, titulaire d’un master de finance et stratégie de Science Po. Romain est basé à Paris, Arnaud à Abidjan.

Ils convainquent des laboratoires pharmaceutiques de marquer par des numéros de série les médicaments destinés au marché africain. Ce tatouage qui permet la traçabilité n’est obligatoire que pour l’Europe. Dès le début, ils misent sur la technologie blockchain qu’Arnaud explique ainsi : « Les laboratoires pharmaceutiques inscrivent les numéros de série des médicaments sur des livres. Les pharmacies écrivent sur ces livres si elles les ont bien reçus. Informatiquement, ces livres sont appelés block et ils sont tous reliés par une chaîne informatique décentralisée et infalsifiable. » L’entreprise apporte son aide à la numérisation des officines en leur proposant une tablette, avec des algorithmes de lecture des bordereaux papier, de gestion des stocks, d’anticipation des commandes.

Plus de 80% des officines ivoiriennes ont adopté l’application, qui fonctionne pour les médicaments Upsa et Inexpharma, connus en Afrique pour leurs antidouleurs et antipaludéens. Meditect, qui emploie 25 salariés et une douzaine de développeur est aussi présent au Sénégal et au Cameroun. 

Quand ce système se sera suffisamment généralisé, il devrait permettre d’identifier les besoins propres à chaque pays.

Laure Belot – Le Monde – 11 mai 2022

Print Friendly, PDF & Email