Il aura fallu plus de dix ans de travail pour tirer son portrait. C’est Sagittarius A*, le trou noir de 44 millions de kilomètres, lourd comme 4 millions de masses solaires, qui se niche au cœur de notre galaxie. Au premier abord, c’est une petite photo floue. Et nous sommes à tel point abreuvés de somptueuses images spatiales de synthèse via les jeux vidéo et les films de science-fiction que nous ne prenons pas la mesure de l’exploit.  

Il faut d’abord se représenter à quel point ce trou est petit aux échelles astronomiques. Imaginez que l’on imprime sur un poster gigantesque de 10 km de large, soit la surface de Paris intra-muros, l’intégralité de notre galaxie spirale, la Voie lactée, constituée de centaines de milliards d’étoiles. Et maintenant posez délicatement au milieu l’aiguille la plus fine que vous puissiez trouver. 

Que regarde-t-on exactement ? Pas le trou noir lui-même, puisque par définition c’est un objet céleste si dense que rien, pas même la lumière, ne peut s’en échapper. Ce que nous observons, c’est le rayonnement de la matière orbitant à très grande vitesse juste au-delà de ce trou noir.

Le plus remarquable est la manière dont on a obtenu ce cliché. C’est le résultat de la collaboration de tous les plus grands radiotélescopes millimétriques au monde, puis le traitement des données – essentiellement celles de 2017 – que l’on a combinées très précisément pour reconstituer un télescope virtuel de la taille de la Terre. 

Et ce n’est pas fini : les images issues de nouvelles observations de 2021 et 2022, avec l’apport d’observatoires supplémentaires, seront sans doute plus nettes. Et dans l’avenir on espère réaliser un portrait animé de Sagittarius A*.

Tristan Vey – Le Figaro – 13 mai 2022
https://www.youtube.com/watch?v=sR-TbaVjkEQ&ab_channel=LesEchos

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