Une mèche de cheveux d’un paléo-esquimau découverte dans les glaces du Groenland était conservée au Musée national d’histoire naturelle du Danemark. En 2010, une équipe de généticiens a réussi à en extraire l’ADN et à le séquencer. Ils ont reconstitué lettre par lettre la phrase longue de 3 milliards de caractères par laquelle s’écrit le patrimoine génétique de cet être humain très ancien.

Les paléogénéticiens nous ont beaucoup appris sur la cinquantaine de millénaires qui nous séparent du moment où Homo sapiens a quitté son berceau africain pour partir à la conquête de la Terre.

Ils nous ont appris que notre génome porte la trace d’autres formes d’humanité avec lesquelles Homo sapiens s’est métissé : l’homme de Néandertal (environ 2% de notre matériel génétique), l’homme de Denisova qui vivait sur les contreforts de l’Altaï jusqu’à la chaîne de l’Himalaya et a laissé aux habitant des hauteurs du Tibet un gène leur permettant de pallier la raréfaction de l’oxygène en altitude.

Ils nous ont appris qu’à mesure qu’il a colonisé de nouveaux écosystèmes, été confronté à de nouveaux pathogènes, adopté de nouveaux régimes alimentaires, Homo sapiens n’a cessé de s’y adapter. C’est ainsi qu’il y a dix mille ans, au Moyen-Orient, quand l’homme s’est mis à cultiver la terre et élever du bétail, un variant lui a permis de digérer le lait. Et c’est un autre variant qui a permis aux paléo-esquimaux de digérer les acides gras polyinsaturés contenus dans les poissons et les mammifères marins.

De tels mécanismes continuent sans doute d’être à l’œuvre. Pour découvrir l’impact que la Révolution industrielle du XVIIIe siècle aura eu sur nos gènes, rendez-vous dans dix mille ans !

Yann Verdo – Les Echos – 8 février 2021
Ludovic Orlando – « l’ADN fossile, machine à remonter le temps » (Odile Jacob, janvier 2021)

Print Friendly, PDF & Email