Cela se passe en Israël, dans le kibboutz Sde Boker, fondé en 1952, et célèbre parce que David Ben Gourion choisit en 1953 d’y passer les vingt dernières années de sa vie. Dans cette ferme collective, située dans le désert du Néguev, l’une des rares à avoir conservé les traditions des fondateurs du pays, on cultive des pêches et on élève des moutons. En 1990, un de ses membres, agronome originaire de Californie, a eu l’idée de planter des vignes et celles-ci donnent du vin. C’est dans l’ADN de cette région où se sont installées des centaines de start-ups à l’avant-garde de la technologie que de tenter des innovations.
On pratique dans ces vignobles la technique de l’irrigation au goutte-à-goutte qui, depuis les années 1960, a déjà fait ses preuves pour d’autres cultures dans cette zone aride. Par ailleurs, le climat du désert, avec ses nuits fraîches en toute saison, est favorable à la vinification. De plus, la sécheresse préserve les plants des insectes et des champignons nuisibles, si bien qu’on peut pratiquement se passer de pesticides, ce qui donne un vin naturellement bio.
Faire du vin dans le désert peut sembler extraordinaire, mais c’est le retour à un usage très ancien. Sur les hauts du Néguev, dans les ruines de l’antique cité d’Avdat – qui fut florissante depuis l’époque des Nabatéens au IVe siècle avant notre ère jusqu’à sa destruction peu après la conquête musulmane au VIIe siècle après Jésus-Christ – des archéologues ont déterré des citernes et des pressoirs vieux de 1600 ans. Les vignes y étaient cultivées en terrasses sur les collines et donnaient jusqu’à un million de litres de vin par an. Ce vin faisait l’objet d’un commerce international puisqu’on a retrouvé des tessons d’amphores en provenance d’Avdat dans des fouilles archéologiques en France et en Grande-Bretagne. Des chercheurs israéliens ont identifié au moins deux sortes de semences anciennes et tentent de recréer du vin blanc et du vin rouge à la byzantine.
Cette réussite dans un environnement apparemment hostile peut, dans un avenir proche, se révéler un modèle d’agriculture pour un monde frappé par la crise climatique.
Isabel Kershner – International New York Times – 13 septembre 2022
https://www.youtube.com/watch?v=jC2cGdQQm1c&ab_channel=i24NEWSFran%C3%A7ais
https://www.voyage-en-israel.com/tourisme/sde-boker/