L’archèterie, artisanat d’art qui a acquis des lettres de noblesse en France à la fin du XVIIIe siècle, risque de se trouver bientôt dans la liste des professions en voie d’extinction. En cause, une demande du Brésil :  interdire à terme la commercialisation du bois de Pernambouc, un arbre de la forêt atlantique du Brésil.

Or c’est de ce bois, aux propriétés uniques que sont fabriqués les meilleurs archets. Il en existe en carbone, mais ils n’ont pas la même qualité de son. 

Les archetiers sont bien conscients de la menace qui plane sur cet arbre, depuis l’époque coloniale, lorsqu’il était surexploité comme bois de teinture. C’est pourquoi, ils participent à la replantation de l’espèce, depuis les années 1970. Et depuis 2003, les archetiers du monde entier se sont regroupés au sein de l’International Pernambuco Conservation Initiative (IPCI) pour financer un programme de replantation. 340 000 arbres ont déjà été replantés par l’IPCI, dont la grande majorité a vocation à rester sur place puisqu’un seul Pernambouc suffit à la production annuelle de la centaine d’archetiers français. 

Le verdict devrait être rendu lors de la Convention sur le commerce international de faune et de flore sauvage (Cites) du 14 au 25 novembre. La Grande-Bretagne, les Etats-Unis, l’Autriche, le Japon, la Suisse, la Corée voteront contre. La France et l’Union européenne hésitent encore. 

Si la mesure était adoptée, les interdictions et les pesanteurs administratives ne toucheront pas seulement la fabrication de nouveaux archets, mais aussi la revente des archets anciens et l’existence même des métiers de la musique. 

Chaque violoniste aura besoin d’un certificat Cites pour entretenir son archet et pour circuler d’un pays à l’autre. La durée de vie d’un archet en pernambouc pouvant aller de plusieurs dizaines d’années à plusieurs siècles, beaucoup ne pourront remettre la main sur la facture d’origine pour prouver que celui-ci provient d’un stock d’avant 2007. Le certificat français sera gratuit et valable trois ans, mais ce n’est pas le cas partout. La Fédération européenne des organisations du spectacle vivant a calculé qu’une seule tournée de l’orchestre du Komische Oper de Berlin coûterait 20 000 euros supplémentaires, sans parler des retards de passage en douane. L’invitation de solistes internationaux se révèlera elle aussi problématique. 

Une pétition qui a déjà recueilli 10 000 signatures a été lancée par une violoniste de l’Opéra de Paris sous l’égide la Chambre syndicale de la facture instrumentale (CSFI).

Thierry Hillériteau – Le Figaro – 30 septembre et 27 octobre 2022

www.csfi-musique.fr

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